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Cet article est également disponible en anglais et en espagnol.

Après une forte baisse de l'emploi des jeunes en Amérique latine et aux Caraïbes, en grande partie due aux effets de la pandémie de Covid-19, les données récentes de l'Organisation internationale du travail (OIT) ont apporté des nouvelles encourageantes. Au troisième trimestre 2022, le taux de chômage était tombé à son niveau d'avant la pandémie. Fait intéressant, « la reprise de l'emploi en 2022 a été plus importante chez les femmes que chez les hommes et chez les jeunes que chez leurs ainés. »1 Il reste toutefois encore beaucoup à faire, notamment au regard des multiples crises mondiales qui ont des répercussions sur la création d'emplois dans tous les domaines.

Dans le cadre du plan d'action pour la jeunesse dans l'action extérieure de l'UE, doter les jeunes des compétences et des ressources dont ils ont besoin pour prospérer et développer leur potentiel est une priorité clé pour l'UE et le projet financé par l'UE intitulé « Programme des organisations de la société civile (OSC) : Renforcer la contribution des OSC aux processus de gouvernance et de développement à la Barbade et dans les Caraïbes orientales. »

Ce dernier a été mis en œuvre par l’initiative Barbados Youth Business Trust en collaboration avec les initiatives Dominica Youth Business Trust et St. Lucia Youth Business Trust dans le but de contribuer à une croissance inclusive, équitable et durable et au développement socio-économique des jeunes âgés de 18 à 35 ans qui ont des ambitions entrepreneuriales. Plus précisément, les trois initiatives pour la jeunesse ont répondu aux besoins des aspirants entrepreneurs souhaitant lancer leur propre affaire, mais avec peu ou pas de connaissances préalables en développement d'entreprise.

Entreprises sociales : de la communauté et pour la communauté

La première leçon apprise par les jeunes entrepreneurs qui ont bénéficié du projet a été de comprendre ce qu'est une entreprise sociale, c'est-à-dire une entreprise qui réinvestit ses recettes et ses bénéfices pour répondre à un besoin ou à un objectif social. Son but est de maximiser les profits qui seront ensuite réinvestis dans une cause sociale ou pour répondre à des problématiques sociales spécifiques. « Notre objectif principal était d'aider les jeunes générations en proposant une formation et un soutien pour qu’ils deviennent entrepreneurs et qu’ils aient un impact positif sur la société. Il ne s'agissait pas seulement d'offrir des compétences et des opportunités, » a expliqué Cardelle Fergusson, directrice générale du Barbados Youth Business Trust, « mais aussi de donner aux individus les moyens de créer éventuellement leur propre entreprise. Nous avons sans cesse recruté de nouveaux talents et dispensé une formation axée sur les besoins sociaux de leurs propres communautés. »

L'incubateur d'entreprises sociales, qui a aidé les jeunes de la Barbade, de la Dominique et de Sainte-Lucie des premières étapes jusqu'au lancement de leurs nouvelles entreprises en faisant appel à des mentors d'entreprise,2 a comblé une lacune dans le développement de l'entreprise sociale. Plus important encore, il a donné la priorité aux concepts d'entreprise dont le premier but est d'employer de jeunes travailleurs âgés de 16 à 30 ans, en particulier issus de communautés marginalisées et/ou rencontrant des obstacles à l'emploi.

« Lorsque vous démarrez une entreprise sociale, vous mobilisez votre communauté pour qu'elle veuille faire plus pour elle-même, en particulier en termes d'indépendance économique. Former un plus grand nombre de jeunes engendrera de meilleures situations économiques et de meilleures conditions de vie en général. C'est une situation gagnant-gagnant, » d'après Cardelle Fergusson.

Enseignements tirés et conseils des responsables de la mise en œuvre de l'incubateur d'entreprises sociales 

1. Comprenez votre environnement et contrôlez en permanence les performances du programme.
2. Échangez avec les communautés locales et investissez dans le travail préparatoire.
3. Écoutez les préoccupations, répondez aux besoins en fonction de celles-ci et renforcez la confiance.

 

1. Comprenez votre environnement et contrôlez en permanence les performances du programme.
L'une des étapes les plus importantes dans la conception et la mise en œuvre d'un projet comme l'incubateur d'entreprises sociales est de comprendre qu'il y aura de nombreux éléments mouvants à différents niveaux. Même si les objectifs et les priorités semblent assez simples, ils reposent sur un ensemble de conditions très complexes.

pictoquoteLa demande et la législation nationales étaient deux des problèmes que les responsables de la mise en œuvre du programme ont dû résoudre au début et tout au long de la mise en œuvre du programme. « Comprenez votre environnement. Qui sont les acteurs ? Quel soutien législatif pouvez-vous avoir en ce moment ? Comment liez-vous les priorités de votre projet à la demande nationale ? Vous devez créer quelque chose qui répondra à un besoin et dont vous savez qu'il bénéficiera d'un soutien à long terme, » précise Cardelle Fergusson.

Si le gouvernement et les autorités locales comprennent que le programme à mettre en œuvre répond à un besoin national, le soutien durera probablement parce qu'il y a un intérêt direct, à savoir le développement économique des jeunes et des communautés en général. 

L'absence de législation spécialisée était un autre défi inhérent au projet. À la Barbade, la plupart des entreprises sont enregistrées en tant qu'organisations à but lucratif ou organisations caritatives. Mais les entreprises sociales se situent entre ces deux catégories. Une nouvelle typologie juridique doit être créée. Étant donné que ce projet a abordé des questions importantes au niveau national et que les responsables de la mise en œuvre ont travaillé en étroite collaboration avec le ministère du Commerce sur la question, un changement dans la législation a de grandes chances d'être réalisable.

Tous les points évoqués précédemment impliquaient également que les responsables de la mise en œuvre devaient surveiller et évaluer en permanence les besoins et la performance des actions planifiées, pour s'adapter en conséquence et en temps opportun. « Connaissez votre environnement, sachez exactement quel est le besoin et qu'il existe un intérêt élevé à répondre à ce besoin ou à ce changement, afin que vous puissiez créer et mettre en œuvre un projet qui est nécessaire. Mais continuez à contrôler les performances et à vous adapter sur toute la durée de la mise en œuvre pour être aussi efficace que possible, » conclut Cardelle Fergusson.

2. Échangez avec les communautés locales et investissez dans le travail préparatoire. 
« Avec les entreprises sociales, les jeunes entrepreneurs aident les jeunes comme eux », précise Fabian Isaac, coordinateur du programme d'autonomisation des jeunes de Sainte-Lucie. « Vous créez des emplois pour votre communauté. Vous contribuez à générer des revenus, ce qui favorise de meilleures conditions de vie. C'est un effet domino : les retombées sont bien plus importantes lorsque la communauté travaille pour la communauté. »

pictoquoteCependant, le manque de compréhension initial de cette idée fondamentale a été l'un des principaux défis lors de la mise en œuvre de ce projet. Au début, les membres de la communauté ne savaient pas vraiment comment fonctionnait le programme. Tout le monde pensait qu'il y aurait un financement pour les jeunes aspirants entrepreneurs. Il était essentiel de prendre le temps de faire le travail préparatoire et d'expliquer en détail comment le projet fonctionnait vraiment. Il s'agissait de changer un état d'esprit très spécifique : « Il ne s'agit pas seulement d'affaires ou de profits. Il s'agit de retombées. Vous ne gagnez pas seulement de l'argent pour votre propre entreprise, mais vous créez également des changements et des opportunités économiques pour votre communauté et vos pairs, » conclut Fabian Isaac.

Il a été difficile de changer la perception des affaires comme de simples termes commerciaux pour faire comprendre l'importance des retombées positives sur des sections potentiellement en difficulté de la société. Cependant, en partageant des histoires de réussite et en échangeant avec les communautés au niveau local, il a été possible d'avoir des répercussions significatives. Ce qui a fait la différence : le travail préparatoire.

3. Écoutez les préoccupations, répondez aux besoins en fonction de celles-ci et renforcez la confiance. 
pictoquoteVoir de jeunes entrepreneurs faire la transition entre l'étape de l'idée et le lancement d'une entreprise sociale fructueuse était ce qu'il y avait de mieux dans ce projet, selon Eamon Gibbons, administrateur de l'entreprise sociale au Dominica Youth Business Trust. « Le mieux était de voir comment ils se débrouillaient seuls après avoir bénéficié du mentorat d'entreprise dont ils avaient besoin. »

Le peu d'estime de soi des jeunes et l'absence d'un système de soutien digne de confiance figuraient parmi les défis initiaux que les formateurs et les mentors ont dû relever. De nombreux stagiaires sont venus à l'incubateur avec de bonnes idées, mais ils manquaient de la confiance et des compétences nécessaires pour transformer leurs idées et leurs passions en entreprises viables.

Être à l'écoute de leurs préoccupations, de leurs peurs, de leurs passions et de leurs objectifs leur a donné les bases solides dont ils avaient besoin pour être réceptifs aux concepts et méthodologies d'entreprise enseignés au cours de la formation. « Écoutez le plus attentivement possible. Soyez celui ou celle qui les motive et continuez à les encourager. Soyez à l'écoute de ce dont ils ont besoin parce que quelque part là-dedans, il y a un potentiel prêt à être peaufiné. Il y a des moments où tous les jeunes ont besoin de quelqu'un en qui ils peuvent avoir confiance et qui peut simplement les écouter, » précise Eamon Gibbons.

Dernières réflexions : des espoirs pour l'avenir
« Les jeunes peuvent déjà apporter de grandes contributions. Ce qu'il faut, c'est renforcer leurs capacités et les former pour améliorer les compétences qu'ils possèdent déjà. Les jeunes ont des solutions concrètes, des expériences et des idées. Nous devons être impliqués dans les différents espaces qui nous affecteront dans les années à venir, » insiste Natalia Gómez Solano, la nouvelle conseillère spéciale pour la jeunesse auprès de l'UE. Et le développement économique est l'un de ces espaces fondamentaux qui permettront aux jeunes d'aujourd'hui de créer un avenir plus stable pour eux et pour leurs communautés.

L'une des réalisations les plus importantes de l'incubateur d'entreprises sociales a été de fournir des conseils à une partie vulnérable (et parfois marginalisée) de la société qui manque souvent de soutien. Beaucoup d'entre eux avaient besoin de découvrir leur propre potentiel et ensuite apprendre à transformer les idées et les passions en quelque chose de plus tangible qui pourrait profiter aux autres dans le même genre de situation. C'est précisément la raison pour laquelle des programmes comme celui-ci devraient être reproduits de manière constante : inclure les jeunes dans l'entrepreneuriat social et d'autres secteurs sera fondamental pour la croissance économique future.

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Renforcer davantage le développement des compétences des jeunes
par Natalia Gómez Solano, Conseillère spéciale pour la jeunesse auprès de l'UE

« Je crois qu'un travail important est en cours, en particulier vis-à-vis de la promotion d'espaces pour le développement des jeunes entrepreneurs dans divers domaines, y compris l'agriculture et la protection des écosystèmes. Ceci est particulièrement important dans un système où ils ne sont pas toujours favorisés.

Je considère qu'il est fondamental de poursuivre ces efforts, car ils permettent de renforcer les capacités locales, de développer des compétences et de financer des initiatives précieuses menées par des jeunes déjà actifs. Tout cela contribue à créer plus d'emplois verts. 

En ce qui concerne le projet à la Barbade, à la Dominique et à Sainte-Lucie, je pense qu'il est important que les efforts soient reproduits : les jeunes de cette région peuvent partager leurs expériences, leurs recommandations et ce qu'ils ont appris avec d'autres jeunes pour construire entre pairs.

De plus, je crois qu'il est essentiel d'intensifier et de reproduire ces initiatives dans d'autres pays de la région (et ailleurs), en fonction de l'apprentissage et des caractéristiques uniques de chaque territoire. »

 

1. L'informalité et la pauvreté des travailleurs pèsent sur les marchés du travail en Amérique latine et dans les Caraïbes, OIT.

2. Les stagiaires ont été associés à des mentors d'entreprises qui les ont aidés tout au long du processus, de l'idée de l'entreprise jusqu'au lancement d'une société fructueuse. Les mentors étaient soit des experts dans le domaine dans lequel le stagiaire souhaitait ouvrir une entreprise, soit des spécialistes de la région dans des secteurs où l'entreprise du stagiaire faisait défaut. Par exemple, si une nouvelle entreprise potentielle manquait de connaissances en comptabilité, le programme attribuerait au futur propriétaire de l'entreprise un mentor d'entreprise pour l'aider à mettre en place le système comptable de la nouvelle société.