Définition Autonomisation pour ce projet -interrogation importante
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Bonjour,
J'espère que vous allez bien.
Pourriez vous svp bien me préciser la définition du concept Autonomisation au sens de ce projet...
INSAF forme et aide à l'insertion professionnelle au sein d'entreprises ou AGR...mais est ce suffisant pour vous ? Par ce que nous nous pouvons avoir des femmes qui quittent leur travail quelques temps après...
Est ce que vous avez un critère délai dans le poste ?
Merci
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Bonjour,
Merci de poser cette question qui semble très importante et centrale pour votre action tout comme pour les actions des autres projets de notre programme.
Le terme « autonomisation » est la traduction (imparfaite) en français de l’anglais « empowerment » qui signifie « donner du pouvoir » ou « fournir des éléments ou mettre en place des conditions permettant de renforcer le pouvoir d’une personne ou d’un groupe de personnes vulnérables» et en l’occurrence il s’agit du pouvoir ou de la capacité, la faculté qu’a cette personne de conduire ou mener sa propre vie dans des conditions décentes.
Cette autonomisation est recherchée à travers un renforcement des capacités des personnes (en général à travers la formation par l’acquisition de compétences de base pour la vie quotidienne, mais aussi des formations professionnelles), l’ouverture d’opportunités (telles qu’un emploi salarié ou l’appui à la création d’un travail indépendant ou d’une activité rémunératrice) et aussi le portage de la voix, de l’expression des besoins de ces personnes, généralement à travers des organisations de la société civile qui leur viennent en aide, sont à leur écoute et sont capables de faire passer des messages aux autorités publiques et aux personnes de bonne volonté susceptibles d’apporter leur aide.
C’est bien dans cette problématique que s’inscrit l’INSAF, qui forme les jeunes mères célibataires et les aident à s’insérer dans des emplois salariés dans les entreprises, ou encore dans l’agriculture.
Vous vous posez la question de savoir si c’est suffisant parce que vous constatez que certaines jeunes femmes quittent leur travail au bout d’un court laps de temps et si je comprends bien votre question vous vous demandez à partir de combien de temps (mois, ou années), on peut considérer que votre action s’est soldée par un succès ou par un échec.
Tout d’abord le critère de durée de l’insertion n’est pas suffisant en lui même. Car une jeune femme peut avoir quitté l’entreprise ou elle a été insérée grâce à l’action de l’INSAF, pour une situation encore meilleure (mieux rémunérée, plus proche du lieu où elle habite, etc. ou encore pour devenir travailleuse indépendante, ce qui peut dans certain cas être une amélioration car correspondant mieux aux besoins de la jeune femme parce que par exemple, cela lui permet de garder et s’occuper de son enfant tout en travaillant). Elle peut avoir au contraire quitté l’entreprise où elle était insérée parce qu’elle a été licenciée, ou l’avoir quitté spontanément parce qu’elle s’y sentait mal à l’aise, souffrant de discriminations de la part de ses collègues de travail ou parce qu’elle ne s’était pas habituée aux conditions de travail en entreprise.
C’est pourquoi le suivi des jeunes femmes par l’INSAF est extrêmement important : même si l’INSAF considère par exemple qu’elle doit intervenir seulement sur une période donnée (par exemple 2 ans, je ne sais pas quelles sont vos règles), il est nécessaire pour l’INSAF de chercher à savoir ce que deviennent les jeunes femmes qui sont passées par elle, au delà même de sa période d’intervention.
Avoir quitté l’entreprise au bout de 6 mois n’est pas un critère négatif si la personne s’est insérée autrement à l’issue de ces 6 mois. Avoir quitté l’entreprise au bout de 2 ans n’est pas forcément un critère positif si la personne a souffert psychiquement pendant ces deux ans et se retrouve dans une situation d’abandon au terme de cette période.
Il n’empêche qu’une statistique sur la durée d’insertion des bénéficiaires de l’action de l’INSAF est une donnée intéressante pour juger du succès de l’action, mais cette statistique (ou cet indicateur) doit porter sur une population comparable. Si vous produisez un indicateur global, celui-ci ne veut pas dire grand chose parce que certaines jeunes femmes n’auront été placées en entreprise qu’une semaine ou un mois auparavant, donc elle feront partie de la proportion des femmes insérées (ce qui augmente le chiffre global) mais pour une durée d’une semaine ou d’un mois seulement (ce qui diminue la durée globale d’insertion). Il convient donc de regarder et d’étudier les bénéficiaires par cohortes. Par exemple celles qui ont été placées au cours du 1er trimestre 2014, que sont-elles devenues au cours du 1er trimestre 2015, et au cours du 1er trimestre 2016 : combien sont restées dans l’entreprise ? Combien ont quitté l’entreprise ? Combien ont quitté l’entreprise mais se sont réinsérées ? Combien ont quitté l’entreprise et ne se sont pas réinsérées ?
Autrement dit, vous pouvez avoir un indicateur montrant combien de bénéficiaires sont toujours en poste au bout de 3 mois, de 6 moins, d’un an, de deux ans, etc. Et vous devez pouvoir atténuer le taux de déperdition (qui forcément apparaît comme un taux d’échec) ou en tout cas l’expliquer en indiquant ce que sont devenues certaines (sinon toutes, ce qui serait idéal) des femmes qui ont quitté leur emploi d’insertion.
Il serait par ailleurs important de commenter quelques indicateurs qualitatifs d’insertion. Les femmes insérées souffrent-elles encore de certaines formes de discrimination dans leur milieu de travail ou au contraire s’y sentent-elles à l’aise ? Comment concilient-elles leur vie de travail et leurs obligations de mères ? Ont-elles besoin d’un soutien psychologique et en bénéficient-elles ? Ont-elles besoin d’assistance pour garder leur enfant pendant qu’elles sont au travail et en bénéficient-elles et sous quelles formes ? Comment voient-elles leur avenir ?
J’espère avoir répondu à certaines des questions que vous vous posez, mais n’hésitez pas à nous relancer pour plus de précisions.
En d'autres termes également, vous vous posez la question de savoir si votre action de formation et d'insertion professionnelles est suffisante. Il est clair que compte tenu du degré d'abandon dans lequel se trouvent les jeunes femmes que vous aidez, la dimension d'accompagenement et de suivi psychologique est essentielle, mais je suppose que l'action de l'INSAF inclue cette dimension.
Cependant si vous vous inquiétez du taux de déperdition, c'est qu'il doit vous posez un problème et dès lors je voudrais vous poser la question: est-ce que vous essayez et est-ce que vous réussissez à rester en contact avec ces jeunes femmes qui quittent leur travail après peu de temps passé en entreprise. Ce serait très important de mener une enquête qualitative auprès d'elles pour pouvoir diagnostiquer les raisons de ces départs et en tirer les lessons pour votre action.
Dans la terminologie de notre projet, l'action de l'INSAF donne lieu à des bonnes pratiques qui seront des exemples à suivre par d'autres associations qui travaillent sur des questions similaires, mais les échecs sont porteurs d'enseignements et à côté des bonnes pratiques, il faut tirer les lessons des échecs et cela peut être parfois même plus important que le succès obtenus.
Bonsoir Jacques,
Merci beaucoup pour cette réponse très complète et qui répond bien à nos interrogations.
Effectivement, nous avons du mal à garder le contact et on le fait en prenant en charge le suivi médical de l'enfant pendant 3 ans. Elles changent de numéro de téléphone, d'adresse, de ville des fois... Donc tant qu'elles reviennent pour ce suivi, on peut les interroger. On est en train de revoir tout ce process pour avoir une meilleure tracabilité.
Nous avons organisé des séances de formation par les paires et nous avons été amenés à reprendre attache avec des anciennes bénéficiaires...et cela a été dur de les retrouver.
Ces formations se passent très bien parce c'est crédible...d'anciennes mères célibataires parlent à de nouvelles bénéficiaires...
Effectivement nous travaillons beaucoup sur l'accompagnement psychologique, le renforcement de l'estime de soi, l'employabilité...
Il faudrait venir nous visiter...
J'espère à très bientot.