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L’Agriculture Naturelle Gérée par la Communauté de l’Andhra Pradesh (APCNF) est le plus grand programme agroécologique au monde en termes de nombres d’agriculteurs inscrits. Le programme a démarré avec 40 000 agriculteurs en 2016 et comptait 700 000 agriculteurs et ouvriers agricoles pratiquant l’agriculture naturelle en 2020. 

Le succès de l’APCNF réside dans sa stratégie innovante de mise à l’échelle d’agriculteur à agriculteur, consistant à identifier des « agriculteurs champions » qui forment les participants aux pratiques agroécologiques et régénératives. Comme les formateurs sont eux-mêmes des agriculteurs pratiquants, leur crédibilité est très élevée et ils sont capables d’inciter les agriculteurs à changer. 

Le programme APCNF prévoit un agriculteur-formateur pour 100 agriculteurs et offre un accompagnement intensif par des agriculteurs, un soutien par les pairs et une vulgarisation agricole aux participants. Les groupes d’entraide féminine jouent un rôle crucial similaire dans l’action collective, la diffusion des connaissances, le soutien mutuel pendant la transition, le financement des membres pour acheter les intrants nécessaires à l’agriculture naturelle, et le suivi et la gestion du programme. Les approches agroécologiques et régénératives sont à forte intensité de connaissances (plutôt qu’à forte intensité d’intrants). Afin d’aider les participants à mettre en œuvre le changement, l’APCNF a mis en place des programmes de partage des connaissances à long terme. 

L’objectif du programme est d’inciter tous les agriculteurs d’un village à devenir des praticiens de l’agriculture naturelle, ce qui prend cinq à six ans. Pour ce faire, l’APCNF se focalise sur les petits exploitants d’une communauté donnée, qui représentent plus de 85 % des agriculteurs. Le fait de voir d’autres agriculteurs récolter les fruits de l’augmentation de la productivité et des revenus de l’agriculture naturelle incite généralement les agriculteurs restants à évoluer progressivement dans cette direction.

Stratégies préventives et adaptatives

La fréquence croissante des sécheresses résultant de la crise climatique est un défi permanent pour les agriculteurs d’Inde. Afin de lutter contre ce fléau, les agriculteurs de l’APCNF déploient une variété de stratégies préventives et adaptatives, l’une d’elles étant la vapeur d’eau atmosphérique. Cette pratique prolonge la saison de croissance et permet aux agriculteurs de semer sans attendre les moussons et de cultiver tout au long de l’année. D’autres stratégies incluent l’utilisation de grandes quantités de Ghana Jiwamrutam (une préparation pour la fertilité du sol à base de bouse de vache) et de paillis afin de maintenir des niveaux d’humidité adéquats dans le sol pour que les semences germent et s’établissent avant les pluies.

Une étude menée par World Agroforestry (ICRAF) a révélé que l’APCNF produit en moyenne 70 % moins d’émissions que les exploitations conventionnelles, avec des rendements similaires, voire plus élevés. Les techniques de l’APCNF sont basées sur de faibles besoins d’intrants et sur des approches innovantes permettant d’atténuer le changement climatique et de s’adapter à ses effets, tout en augmentant la production et les revenus des agriculteurs de cette région.

Mise à l’échelle et diversification face aux obstacles systémiques

Des processus sociaux profonds comme les méthodologies d’agriculteur à agriculteur et de femme à femme font partie intégrante du programme. Le soutien du Département d’État à l’Agriculture dans le processus de transition a également été un facteur déterminant. Le succès de l’APCNF démontre que l’agriculture naturelle n’est pas seulement hautement bénéfique, mais qu’elle peut aussi être mise à l’échelle dans un délai raisonnable quand une stratégie spécifique à la communauté est en place. 

L’objectif d’inscription au programme APCNF pour 2021 est de 1,05 million d’agriculteurs et d’ouvriers agricoles. À terme, ils envisagent d’inscrire les 6 millions d’agriculteurs et 2 millions d’ouvriers agricoles sans terre (selon les estimations) de la communauté de l’Andhra Pradesh dans le programme et d’étendre l’agriculture naturelle à toute la superficie cultivable de l’État.

Systèmes agroécologiques pour la sécurité alimentaire, l’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de leurs effets, et la préservation de la biodiversité

Les nouvelles technologies agricoles ont connu un véritable essor dans les années 50 et 60. Cette révolution verte a augmenté le rendement agricole et était une promesse de prospérité, mais elle a également pollué les sols et l’eau, marginalisé les petits agriculteurs et éliminé les cultures et régimes traditionnels. L’uniformisation croissante des paysages agricoles a conduit à la perte d’habitats de la faune, créant les conditions parfaites à la contamination des populations humaines par de dangereuses maladies.

L’avenir de l’agriculture pourrait converger autour d’un concept simple, mais puissant : l’agroécologie. L’agroécologie promeut des pratiques agricoles en accord avec la nature, et non contre la nature. Elle permet de développer une résistance au changement climatique, aux épidémies, en combinant des plantes et des animaux selon les connaissances des agriculteurs sur leurs environnements locaux. L’agroécologie ne mise pas sur des produits chimiques pour fertiliser les champs et éliminer les nuisibles. Elle mise sur la diversité. Et la diversité dans les champs est synonyme de nourriture fraîche et nutritive pour les communautés. Elle assure des moyens de subsistance basés sur la coopération, la solidarité et des chaînes d’approvisionnement courtes qui retiennent de la valeur dans la communauté.